jeudi 24 juillet 2008

Close Up

Une aventure ambiguë et étrange qui aurait pu me faire sentir quelque peu dépossédée, m'a donné envie de mettre cet écrit extrêmement intéressant de J-L Comolli au sujet du film de A.Kiarostami Close Up (revu la semaine passée).
Un Chef d'œuvre complet.


L’un des coups de force de ce film est de défier toute tentative de description précise : la description devient destruction. Le principe de mise en abyme qui gouverne toute représentation est ici poussé au paroxysme. Identités, personnages, rôles, places...

Comolli:
Quelques années avant La Nuit du coup d’État et Dans la chambre de Vanda, Abbas Kiarostami tournait Close-up (1994). Le film, on le sait, procède d’un fait-divers qui n’est pas, déjà, sans être exemplaire. Un jeune chômeur de Téhéran se fait passer pour un cinéaste connu, Mohsen Makhmalbaf, dupe une famille entière, se fait arrêter et finalement pardonner par ses victimes. Kiarostami rencontre ce jeune homme, qui accepte d’être l’acteur de son propre rôle. L’imposteur joue l’imposteur et nous ne sommes plus dans l’imposture : en quelques mots, tel est le nouveau « paradoxe du comédien » que nous propose Kiarostami, comme un défi à nos capacités de spectateur.
Le film est ce qui arrive à l’acteur, disions-nous : cela arrive ici doublement, il y a le film imaginaire (celui de la croyance) rêvé par Sabzian à travers « Makhmalbaf », il y a le film réel joué par Sabzian avec le « vrai » Makhmalbaf. Le spectateur est pris entre deux films. L’entre-deux serait la formule préférée du cinéma de Kiarostami : entre le premier étage et le rez-de-chaussée, entre l’acteur et le personnage, entre l’aveu de l’artifice cinématographique et sa dénégation, entre la route principale et les chemins de traverse, le lien (cinématographique) serait à la fois noué et dénoué, repris et perdu.